[08/10] L’accident

Départ poussif

Malgré une motivation pas très présente (surtout pour la route), je commence le matin assez tôt pour retourner sur cette quatre voies afin de rejoindre Vinh, situé à 200 kilomètres.
Je fais une étape après 100 kilomètres en ne trouvant pas facilement un hôtel à Tĩnh Gia. Qui plus est, assez cher ! Je négocie à moitié prix avec succès.
En allant retirer de la monnaie, je découvre cette ville un peu fantôme. Une grosse route au milieu et beaucoup de poussière.
Ne trouvant rien à l’extérieur, je me rabat sur le restaurant de l’hôtel.

Lever avec une motivation encore en baisse, j’hésite à partir. Fatigué, une route ennuyeuse et pleine de poussière, encore 100 kilomètres.

A ce moment, j’aurais dû me rendre compte de quelque chose. Trouver une autre alternative que d’enchaîner sans plaisir les kilomètres. Par exemple, le train entre Ninh Binh et Hue. C’est assez amusant, car j’en avais justement discuté avec une fille à l’hôtel de Ninh Binh, mais je ne me voyais pas prendre le train, focalisé sur ce vélo et cette date qui approchait.

C’est avec difficulté que je me remet en route. Je fais la rencontre furtive d’un québécois sur la route.
Nous discutons un peu de voyage puis nous nous quittons car il va plus lentement que moi.
Puis je m’arrête dans un café et commande un café vietnamien qui met beaucoup de temps à infuser, et qui finira par être presque froid quand je le boirais. Je me rappelle de la sensation d’impatience pour ce café, comme si quelque chose me disait de ralentir le rythme. 

Deux signes qui me disent de ralentir, mais j’ai la tête dans le guidon, au sens propre comme figuré. Je ne prends pas la peine d’écouter mon corps fatigué et mon esprit passablement ennuyé par cette foutue route. Tous les signaux étaient rouges et donc un risque élevé pour un accident.

La chute

Je fonce, j’avance à une moyenne de 30km/h pour en finir le plus vite possible.

Et le moment de la chute en voulant éviter une voiture sur ma gauche, je perds l’équilibre, lancé en pleine vitesse et l’esprit déconnecté.
La scène se déroule au ralenti, je sais que je vais tomber. Pas de peur, juste une sensation que le temps a ralenti d’un seul coup. Un bullet-time à la Max Payne.
Je tombe sur le côté gauche, et glisse sur le bitume. J’aperçois Kaihopara Rangi se coucher sur le côté gauche aussi.

Un d’un coup, tout redevient normal. Je reprends mes esprits. Mes affaires de la sacoche avant sont sur la route. Je les ramasse sans me soucier que je suis sur la route.
Puis un motard arrêté sur le bas-côté me fait signe de venir. Encore une fois, je n’ai absolument conscience du danger que représente cette route.

Une fois sur le bas-côté, je m’attèle à vérifier si tout va bien sur mon corps. Quelques contusions sur le côté gauche, coude gauche amoché. Puis je m’étire et sens une douleur à l’épaule gauche. L’adrénaline faisant encore son effet, je n’ai pas encore conscience que c’est cassé.
Puis en tâtant l’épaule je sens l’os de la clavicule qui fait une bosse inhabituelle. OK c’est vraiment cassé.
Un tour de Kaihopara Rangi ne révèle presque aucune égratignure, mis à part la sacoche avant percée par le frottement avec le bitume.

A peine remis de mes émotions, que je suis prêt à me remettre en selle. Le motard me dit d’attendre (enfin se fait comprendre car il ne parle pas un mot d’anglais).
Je m’assois, il m’offre une boisson énergisante et me montre mon coude gauche qui saigne et assez sale.
Il a raison, je dois nettoyer tout ça. Grâce à ma trousse de secours, il me désinfecte la plaie et fait un bandage.

Je remonte sur mon compagnon, et je réalise que ça va être douloureux de tenir le guidon avec la main gauche. Tant pis, je roule à une main. Il reste encore 25 km avant Vinh, où je pourrais aller à l’hôpital.
Le motard propose de me suivre jusqu’à Vinh et sur la route, il me ravitaille en eau. C’était vraiment sympa à lui. Je n’ai pas pu le remercier car on s’est perdu de vue avant d’arriver en ville.

A l’hôpital

Pus j’arrive à Vinh et vais au premier hôpital. Le personnel parle très peu anglais mais en montrant mes contusions et indiquant la clavicule, on s’occupe de moi. On nettoie toutes mes plaies puis on me dirige vers le service de radiologie.
Encore une fois, je suis l’attraction, tout le monde me regarde avec curiosité.

On me demande de patienter dans la salle de radiologie pendant qu’un patient fait une radio. La salle est fermée par une grosse porte en plomb et le matériel paraît assez vieux, en tout cas pas de la dernière génération.
Néanmoins, c’est un peu moins pire que ce que j’imaginais.

Puis on me conduit chez le médecin, qui me confirme que c’est cassé. OK mais je ne sais pas ce qu’on va me faire : opération ou simple attelle ?
Une infirmière me conduit à travers l’hôpital puis dans une salle avec des lits.
Un autre médecin arrive avec plusieurs infirmières, heureusement il parle un peu anglais et m’explique la procédure. Ils vont me mettre une attelle, il n’est pas nécessaire d’opérer pour ce genre de blessure. Me voilà rassuré.

Pendant qu’il m’installe l’attelle, on n’hésite pas à me poser les questions habituelles. Ça me fait sourire lorsqu’on me demande si je suis célibataire et pourquoi car je suis assez mignon. “Tu sais, elle est célibataire aussi, pourquoi tu ne resterai pas au Vietnam ?”.
Je souris poliment et rigole avec elles. Ça me fait oublier la douleur pour un moment ! Je dois donc garder l’attelle au moins 45 jours. Ça va être sympa pour se laver !

Une des infirmière me raccompagne chez le médecin, récupère des papiers puis direction l’entrée pour payer. Ça ne me coûte pratiquement rien, je dois juste retourner au premier étage pour payer directement l’attelle. C’est assez confus la manière dont c’est géré, je me laisse simplement conduire par l’infirmière.
Une de ses collègues semble s’amuser de la situation. En effet, je dois faire presque deux têtes de plus qu’elle, la différence est assez flagrante !

Bon me voilà réparé. Nouvel mission, trouver un hébergement pour la nuit, de préférence près de la gare.
J’en trouve un sur ma carte, à 2 kilomètres, en espérant qu’il y ait des chambres de libre. Bonne pioche !
C’est un peu galère de monter mes sacoches à une main, heureusement que j’ai de l’aide du gérant.

Le soir arrivant, en cherchant un restaurant, je tombe dans une cour. C’est en effet un restaurant mais pas de menu. Plusieurs personnes sont assis autour de la table, bien garnie de nourriture et bières.

Finalement, je me fais inviter. Je mange les restes du repas qui sont plus que suffisant, on m’offre bière et alcool de riz. On trinque plusieurs fois, je commence à avoir la tête qui tourne. L’alcool aidant un peu à supporter la douleur (qui n’est pas trop violente heureusement).
Puis je prends congé car sinon je ne vais pas pouvoir rentrer et la fatigue accumulée de toute la journée commence à me tomber dessus. Très heureux d’avoir pu partager un moment avec un étranger, je n’aurais pas à débourser un centime.

Quel journée !

Retour en haut