[17/33] Un mois de vie monastique

Nouvelle expérience, dans un monastère bouddhiste, très enrichissante dans ce voyage.
Je reviens un peu en arrière pour expliquer un peu mon background concernant le bouddhisme.
Il y a plusieurs années, j’ai commencé à m’intéresser à la culture orientale par le biais du Japon grâce aux mangas et qui a évolué vers un intérêt plus profond pour la culture elle-même, et découvert le shintoïsme et bouddhisme. Puis j’ai débuté des cours de Taï-Chi et d’Aïkido en parallèle. Premier pas dans les arts martiaux et la connaissance de l’énergie, le Chi.

Puis je me tourne vers le Kundalini Yoga et la méditation pendant 2 ans, qui ont été bénéfique pour le renforcement de mon mental et de prendre conscience de mon esprit.
Je lis divers livres sur le développement personnel, psychologie et culture orientale. Je m’intéresse d’un œil curieux au bouddhisme à partir de la Nouvelle-Zélande à travers les livres encore une fois et quelques rencontres.

Mon intérêt s’est très fortement renforcé pendant mon woofing car mes hôtes pratiquaient quotidiennement la méditation mais d’une branche dérivée du bouddhisme.

Comment se déroule une journée type ?

Comme dans tout monastère bouddhiste, il y a des règles et un programme à respecter. Selon les monastères, il y a plus ou moins de flexibilité.
Dans mon cas, à Santi Forest Monastery, c’était assez relax.
Je débute ma journée à 5h30, avec ma séance de réveil (mix de Taï-Chi et échauffement d’Aïkido) que j’utilise quotidiennement pour le vélo. Puis une méditation à partir de 6h jusqu’à 7h.

Petit-déjeuner et nettoyage jusqu’à 8h.
Ensuite Work meeting pour répartir les tâches à effectuer. Cela varie entre : nettoyage, cuisine, jardinage, bricolage. Et le maître mot est “Enjoy!”. Pas de stress, pas de deadline, on fait notre tâche à notre rythme, si ce n’est pas fini aujourd’hui, on continuera demain (à part la cuisine évidemment).
On travaille jusqu’à 10h30 environ puis à 11h, le déjeuner et de nouveau nettoyage jusqu’à 12h30.

Et nous avons ensuite tout le temps libre jusqu’à 18h pour méditer, lire, marcher.
À 18h, nous pouvons boire du thé et manger quelques carrés de chocolat. Eh oui pas de repas après midi jusqu’au lendemain matin.
Vers 19h, c’est le moment où on se rassemble pour discuter de la méditation, écouter les conseils de la doyenne et conférences de Ajahn Brahm, méditer tous ensemble, visionner des documentaires.
Et cela jusqu’à 21h environ et ensuite au dodo.

Comment s’est déroulé ma retraite ?

Dès les premiers jours, je réapprend les bases de la méditation que je mets rapidement en application. Après quelques jours, j’arrive à mieux canaliser mes pensées mais très vite je tombe dans une période tumultueuse. Impossible de me concentrer, la majorité de mes pensées partent dans tous les sens, et principalement dans un futur hypothétique, puis dans les désirs et envies.

Après 3 jours difficiles, c’est lors d’un repas de midi que je fais la rencontre d’Ome et Shina, un couple thaïlandais.
Tous les week-ends, un groupe de personnes apportent à manger au monastère bouddhiste, ce moment est appelé Dana. C’est très souvent la communauté sri-lankaise ou vietnamienne qui se joint à nous.
Les repas sont toujours très généreux, à l’image des personnes.
J’ai vraiment eu un bon feeling avec ce couple et ils m’ont gentiment proposé de passer les voir quand je remonterai sur Sydney.
Nous avons pu discuter de sensibilité et de mon voyage à vélo. Ça m’a éclaircit l’esprit et permis de terminer la journée plus positivement.

La deuxième semaine se passe mieux, je commence à entrevoir mon erreur de la semaine précédente. Je forçais trop mon esprit à ne plus penser, résultat il s’est rebellé, le bougre, en me bombardant de pensées. Tout le contraire ! Il me faut être plus souple accepter les pensées. Je garde encore cette “dureté” envers moi-même.
Mais c’est aussi la période où j’avais envie de reprendre contact avec ma famille et amis. Moment un peu difficile, mais que j’ai réussi à accepter.

En musique

La troisième semaine démarre difficilement, je décide donc de réduire mon temps de méditation, plus de repos et de lecture.
Je me remet à écouter de la musique (en dehors des séances de méditation) après deux semaines de silence.
J’essaie de mesurer l’impact sur ma méditation et mon bien-être en parallèle.
Finalement, en fin de semaine, ma méditation se fera plus profonde, j’arrive à un état plus léger et mes pensées me perturbent beaucoup moins.
C’est un des points culminant de ma retraite.

Difficile de savoir si la musique à eu un impact durant cette période, mais elle a été et même encore aujourd’hui, une sorte de thermostat.
La musique est importante pour mon équilibre émotionnel, un peu moins qu’avant toutefois.
Ma vision de la musique évolue aussi depuis que je suis en voyage. Je privilégie de plus en plus les artistes indépendants et participe à des campagnes de crowdfunding pour financer des albums. J’ai un budget dédié uniquement à la musique, indépendamment de mon budget voyage.

La quatrième semaine, je prends la décision de partir le lundi suivant, comme prévu au départ.
Conséquence ou non, ma méditation sera difficile une nouvelle fois, impossible de me concentrer.
Je me pose la question : ai-je pris la bonne décision ? Pas trop de signes en ce moment, à part cette invitation d’Ome et Shina, sur ma route.
Je patiente et attends d’éclaircir un peu mon esprit pour savoir si je suis en accord avec moi-même.

En mouvement

Le jeudi, nous organisons une sortie tous ensemble (actuellement 7 personnes) sur la côte. Le temps est frais, pas encore de baignade pour le moment. Nous trouvons un super spot pour prendre le café puis direction dans un parc national pour visiter une Rain Forest. Superbe endroit, gorgé d’énergie !
Cette sortie a été bénéfique, le fait de changer d’endroit m’a bien aéré la tête.

Ça confirme ce que je ressentais, un besoin permanent de bouger, changer d’endroit, rencontrer de nouvelles personnes. En seulement 1 mois, j’ai déjà envie de repartir. Assez étonnant, moi qui était plutôt casanier avant.

L’idée de faire une étape à Sydney, le temps de travailler un peu puis trouver une nouvelle ville aux alentours pourrait être un bon compromis.
Ça sera d’ailleurs les derniers moments où je pourrais me permettre de rester à un endroit car par la suite, les visas seront trop court et ne me permettent pas de travailler.
Et mon voyage vers Perth va m’occuper pendant quelques mois.

Qu’est-ce que j’ai appris ?

Énormément de choses ! N’ayant pas encore pris le temps et le recul nécessaire pour faire le bilan, je vous donne quelques exemples qui me viennent à l’esprit :

  • Une connaissance plus approfondie du bouddhisme
  • Des nouveaux points de vue sur la Vie
  • Un début de compréhension du fonctionnement de mon esprit
  • Un guide de méditation avec les étapes et les embûches pour aller jusqu’à l’éveil
  • La gratitude. Chaque jour, on me remercie pour le travail accompli, aussi minime soit-il.
  • Cultiver sans relâche l’Amour, la compassion, la paix avec soi-même et notre entourage
  • Que la méditation est un outil puissant qui peut transformer une personne, qu’importe son histoire
  • Faire face à la réalité avec une attitude ouverte et positive

Mes moments préférés

Les débats sur les sujets d’actualités (crise financière, guerre en Syrie) mais aussi la visualisation des documentaires sur la mort, le transhumanisme, le earthgrounding.

Les marches aux alentours du monastère et les deux points vues avec la possibilité de méditer en haut d’une falaise et cette sensation de vertige quand on ouvre les yeux.

La grande salle de méditation, chaleureuse avec son plancher en bois. J’adore marcher pied nus et ressentir chaque pas (marche méditative).

Les bons repas sri-lankais et vietnamien. Riz, légumes, épices, soupes dans un simple bol. Et des fruits frais en dessert. J’ai troqué ma fourchette et mon couteau pour une cuillère.
Manger plus simplement, sain et végétarien, c’est dans la continuité de ce que j’entreprenais déjà auparavant.

Et la suite ?

Je suis maintenant un convaincu (et non converti) du bouddhisme. C’est une voie que je vais continuer à suivre et à approfondir.
Peu de choses vont changer car j’ai déjà entrepris les changements : méditation quotidienne, végétarisme, l’importance et la responsabilité de mes actions et mes paroles, confiance en l’Univers (encore fébrile par moment), ou l’âme du monde, comme le nomme Frédéric Lenoir.
Pour moi, le bouddhisme va devenir ma philosophie de vie, le côté religieux en moins pour le moment.

Mais aussi, ces 4 derniers mois m’ont permis de voir le travail d’une autre manière. J’ai travaillé sans retour d’argent mais contre un toit et de la nourriture.
Par deux fois, je suis sorti de ce système régit par l’argent, la compétition, le toujours plus et ces expériences m’ont vraiment plu, apporté un bien-être et des relations plus “vraies”.
Je le ressentais déjà à Brisbane, au moment de reprendre le voyage au lieu de chercher un travail.
L’argent reste le seul point un peu handicapant pour le moment, mais j’apprends a faire avec.

Je ne sens pas trop l’étape vers Sydney mais il est pourtant nécessaire que je gagne encore un peu d’argent pour continuer mon voyage.
C’est peut-être la manière de travailler qui me dérange, surtout dans une grande ville.
J’ai encore l’option de freelance avec Daniela mais aussi tenter dans une ville aux alentours de Sydney, même si le boulot est moins payé.
Je garde l’objectif d’utiliser les 3 prochains mois pour gagner assez d’argent. On verra comment ça se déroulera !
Il me faut juste être patient et éviter de reprendre la route précipitamment.

Nouvelle vision

Ma réflexion va également au-delà de ce voyage, comment je veux vivre ?
Pour le moment, ma vie nomade me convient parfaitement, j’aime ce style de vie simple, changer d’endroit régulièrement, se rattacher à la nature et éviter la vie urbaine, devenue oppressante pour moi.

La lecture du livre “Vivre sans argent” de Benjamin Lesage m’a également bien inspiré et il vient tout juste de débuter, en juin, son projet Eotopia. Une communauté sans argent, basé sur l’échange.

Une chose est sûre, ma vie sera très différente par rapport à ce que j’ai vécu auparavant.
Le contexte géo-politique et économique sont également incertains et mon voyage sera peut-être impacté, c’est pour cette raison qu’il faut rester vigilant et être prêt à s’adapter à n’importe quelle situation, aussi désagréable soit-elle.

L’impermanence des choses.

Photos : Santi Forest Monastery #1Jervis Bay

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