[2/20] Suan Mokkh International Dharma Hermitage

Me voilà dans un centre de méditation en Thaïlande pendant 10 jours. Il y a même un an, je n’aurais jamais imaginé être là un jour.

Une cinquantaine de personnes, avec une répartition égale entre les hommes et femmes, une moyenne d’âge de 30-35 ans je pense.

L’environnement est plaisant, beaucoup de nature, un agencement aéré. Seul les bâtiments construits en béton, refroidissent l’atmosphère. C’est une constante en Thaïlande, ces bâtiments en béton ciré.
Durant la durée de la retraite, nous avons chacun une chambre privative. Quelques mètres carrés en béton, une porte en bois avec un cadenas, un espace surélevé pour dormir, une natte en bambou et un oreiller en bois en guise de lit.

Cette rusticité ne me gêne guère, ayant été habitué à dormir dans 2m² dans ma tente avec un simple matelas.
J’apprécie le confort d’un bon lit mais ce côté, simple, spartiate à toujours un effet bénéfique pour moi.

La vie quotidienne est rythmée par le Gong, je retiens à peine le programme de la journée et me laisse guider. Suivre le mouvement et ne pas prévoir.

Lever à 4h du matin et coucher à 21h30. Trois pauses dans la journée : le petit déjeuner, le repas de midi et une pause thé à 18h.

En dehors de la méditation (assise et marche), il y a des talks sur l’explication de la technique de respiration Anapanasati, ainsi que la philosophie bouddhiste.
Des sujets simples à comprendre et bien expliqué, ça m’a aidé à comprendre plus profondément le bouddhisme.
Il y avait aussi des cours de yoga et Taï-Chi le matin après les 2 premières heures.

Difficile parfois de rentrer dedans mais vers la fin de la retraite, je retrouve des sensations de mes 2 années de pratique du Taï-Chi en France.
C’était vraiment un plus pour se détendre les muscles avant une longue journée de méditation.

Durant l’après-midi, une heure était consacrée au chant. J’en connaissais déjà quelques uns à travers mon expérience en Australie.
Tout ce qui touche de près à la musique me rebooste et ça me permettait de tenir moralement jusqu’au soir.

Sur la méditation en elle-même, chaque jour était différent. Des moments de calme, de douleurs physique, de tristesse, d’errance, de chaos, de contemplation, de joie.

Chacun de nous traverse différemment ces moments.
Le fait d’être seul, face à soi-même, sans aucune distraction possible est le plus dur.
La méditation apprend à accepter ces états, émotions et faire en sorte qu’ils ne nous atteignent plus.
D’en arriver à simplement les observer, comprendre leur langage et agir en conséquence. Ne plus réagir, c’est le début de la sagesse.

Beaucoup de souvenirs reviennent à la surface, comme des petites bulles. Parfois, je l’ouvre et rentre dans le souvenir, parfois je vois simplement une image, un son, une odeur.

Comme je l’avais constaté auparavant, je me suis détaché de ces souvenirs. Je n’ai aucun regret, mélancolie ou nostalgie par rapport à eux. J’apprécie simplement le fait qu’ils apparaissent inopinément.

Le jour 9 sera un jour spécial, je ne serais pas le seul d’ailleurs.

Il commence pourtant très mal, impossible de me concentrer le matin, impossible de tenir 5 minutes en place. La séance de Taï-Chi me recentre puis enfin arrive la marche méditative.

Je relâche la pression, retrouve un état limite hypnotique, rythmé par mes pas.
Puis arrive la bulle de sagesse, une réponse de la vie. Une immense joie envahit mon corps.
Une réponse tellement simple mais si compliqué à percevoir, pris dans le schéma de mon ego.
Cette réponse, c’est la raison pour laquelle j’ai toujours eu ce sentiment de ne pas me sentir à ma place.

Depuis tout petit, j’ai toujours vécu dans un cocon, bien en sécurité par rapport au monde extérieur. Ce monde extérieur, violent, menteur, où chaque jour s’abreuve de souffrance.
Impossible pour moi d’y rester. Quand j’allais à l’école avec cette boule au ventre, je n’avais qu’un souhait, retourner à la maison, m’isoler dans ma chambre.

En grandissant, j’ai réussi à m’adapter tant bien que mal.
À 26 ans, je commence à me découvrir. Début de l’ouverture vers le monde.
À 29 ans, je pars pour ce tour du monde. Une raison de ce voyage est de voir autre chose, quelque chose me pousse à explorer.

Puis ce voyage s’est transformé, comme il m’a transformé.
Une quête d’un endroit où je pourrais vivre paisiblement.
Et cette réponse, qui a traversé mes neurones : aucun endroit ne sera paisible si tu n’es pas en paix avec toi-même.

Je pourrais parcourir le monde pendant 10 ans, si je n’évolue pas, rien ne changera.
Ce voyage m’apprend donc à faire face au monde réel, aussi dur soit-il.
Et réussir à voir le positif dans chaque chose, ne plus se laisser mener par mon côté noir.

C’est donc le but de ce voyage.

Pour en revenir à ce neuvième jour, il se termine par une pleine lune dont le reflet viendra lécher la surface du petit lac.
Nous étions en majorité assis devant ce superbe tableau, subjugué par cette nature et cette énergie.
Un moment inoubliable !

Puis le dixième jour se termine, nous pouvons de nouveau parler en soirée.
Nous avons la possibilité de parler de notre expérience à tout le monde.
Étonnamment, j’étais excité à l’idée de partager mon expérience mais arrivé devant tout le monde, j’oublie la moitié de ce que je voulais dire…
Pas grave, je pense avoir dit le principal !

Le lendemain, les adieux. Chacun part vers sa prochaine destination. Je reste avec une française à discuter puis elle part pour Surat Thani.

Me voilà, de nouveau seul, au monastère.
Je reçois un petit coup de massue sur le moral.
Même si l’on ne parle pas pendant 10 jours, il y a toujours une présence, quelques regards ou sourires partagés.

Étonnamment, des liens se créent et du jour au lendemain, ils sont rompus.
Je ne m’attendais pas à avoir ce sentiment de solitude s’abattre si lourdement.
Malgré tout, j’arrive à m’endormir et décide de partir dès le lendemain.

Photos : Suan Mokkh International Dharma Hermitage